Dans une version préliminaire adressée au Congrès américain, le budget fédéral 2026 proposé par la Maison-Blanche cesse de financer la fusée ultralourde SLS de la Nasa, sa capsule habitée Orion, ainsi que la station spatiale Gateway sur orbite lunaire.
Le VAB, bâtiment à l'intérieur duquel est assemblé le SLS au
Centre spatial Kennedy. Crédits : NASA
La rumeur disait que la Maison-Blanche les avait dans le
viseur. C’est dorénavant écrit noir sur blanc. L’administration Trump ne veut
plus des véhicules de la Nasa qui ont été développés pour la Lune. Selon les
édiles de Washington, la fusée géante Space Launch System (SLS) et la capsule
lunaire Orion ne devraient pas faire plus de trois vols, ils seront mis au
rancart après la mission Artemis 3 (qui doit déposer un équipage sur notre
satellite). La station spatiale en orbite lunaire, la Gateway, déjà en cours de
fabrication avec une grande contribution de l’Europe, ne sera jamais assemblée.
Dans sa première version de proposition de budget fédéral
pour l’année fiscale 2026, parue
le 2 mai 2025, les coupes que la présidence américaine compte infliger à la
Nasa sont même légèrement supérieures à celles
que nous attendions depuis mi-avril : 6,3 milliards de dollars de
moins que les 24,9 milliards du budget annuel de l’Agence spatiale américaine
en 2025.
« Sur la Lune avant la Chine »
« Le SLS seul coûte 4 milliards de dollars par
lancement avec un dépassement de budget de 140 %, justifie le document. Le
Budget finance un programme qui remplace les vols de SLS et Orion vers la Lune
par des systèmes commerciaux plus rentables qui soutiendront des missions
lunaires ultérieures plus ambitieuses ». Cette attaque portée au lanceur
qui a
déjà volé pour Artemis 1 en 2022 ne signifie pas que la Maison-Blanche
compte abandonner l’exploration humaine de la Lune. 7 milliards de dollars y
sont toujours consacrés, avec pour objectif encore affiché de « retourner
sur la Lune avant la Chine ». À cette enveloppe s’ajoute 1 milliard de
« nouveaux investissements pour des programmes [habités] focalisés sur
Mars ».
Échantillon de Mars pour la Chine
Le document de la Maison-Blanche confirme également la
volonté de cesser tout financement de mission
de retour d’échantillon martien (Mars Sample Return), pour laquelle le
rover Perseverance est actuellement en train de prélever, et semer dans des
capsules étanches, des roches sur la planète rouge… Rapporter des échantillons
de Mars est « un objectif qui serait accompli par des missions humaines ».
Mais une telle mission « n’est pas programmée avant les années
2030 ». Donc après la mission robotisée Tiawnen-3 censée partir pour Mars
en 2028. En cas de succès, cela fera de la Chine la première nation à rapporter
une roche prélevée sur la planète rouge.
L’Europe sans son partenaire
Sans roche américaine à analyser dans ses laboratoires, sans
module de service à fabriquer pour la capsule Orion, et sans station lunaire
Gateway – pour laquelle l’ESA doit fournir au moins trois éléments clés (dont
l’important module habité I-Hab exposé à la Cité des sciences et de l’industrie
à Paris) – l’Europe serait la grande perdante d’une collaboration avec la Nasa
réduite à néant. « L’ESA reste ouverte à la coopération avec la Nasa sur
les programmes destinés à être réduits ou arrêtés, mais évalue néanmoins
l’impact avec nos états membres en préparation du Conseil de l’ESA de
juin » a réagi le 5 mai son directeur Joseph Aschbacher.
Dans les semaines à venir, la Maison-Blanche devra présenter
son plan fiscal complet, donnant plus de détails quant aux évolutions
budgétaires jusque-là formulées dans les grandes lignes. In fine, ce sera au
Congrès américain que reviendra la tâche de rédiger le budget des Etats-Unis,
au terme de débats entre sénateurs qui n’ont, cette année, aucune raison d’être
moins houleux que les années précédentes…